mercredi 10 juin 2020

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Sortie tôt pour aller aux Emma. Vu la file d'attente, le filtrage à l'entrée, être dans les premiers se mérite en arrivant une heure avant l'ouverture.

J'ai un logiciel de Sudoku  sur mon portable en cas pour passer le temps, mais E.  le philosophe était déjà là.
Comme à chaque fois une discussion avec deux points de vue opposés sur le thème aujourd'hui de l'injustice sociale due à la naissance dans un milieu favorisé ou non. Pour lui être riche s'hérite, pour moi chacun peut le devenir. J'ai introduit en plus la notion de génétique, on naît plus ou moins doué, une manière d'exacerber un peu plus nos points de vue.
Il m'a opposé qu'il était né dans une famille pauvre et que, par exemple, ses parents ignoraient  l'existence  de l'ENA et que dès lors il n'avait eu aucune chance d'y rentrer, et bien entendu j'ai affirmé qu'il y avait quelques élèves d'origine modeste dans cette école, que le système éducatif faisait tout pour éclairer les parents sur les possibilités de leurs enfants, qu'il y avait des bourses, etc..
J'ai insisté en affirmant que le devenir de quelqu'un se jouait à 60/40, 60% pour  les capacités intellectuelles, donc quelque part la génétique, 40 % pour l'influence du milieu et la qualité de l'éducation. Lui m'a rétorqué un 20/80, réaffirmant  que l'origine sociale était responsable de presque tout quels que soient les potentiels du sujet... Une vision libérale contre une vision de gauche. D'un côté l'individu a toutes ses chances tandis que de l'autre il  ne pourra pas échapper à son destin prédéterminé et par conséquent n'est responsable de rien.
Nous avons poursuivi autour de ce thème jusqu'à ce que les portes s'ouvrent.

Tandis qu'il allait vers les livres, j'ai bifurqué plus tôt à droite cette fois-ci pour voir dans les tableaux et divers si un beau dessin que je me suis accordé au bout de deux jours de réflexion y était encore. Il y était et j'ai aussi trouvé, très bien encadrée, cette vue de Jérusalem, gravure sur deux pages tirée du livre de Sebastian Münster, Cosmographica, Bâle, 1544. Mon exemplaire est d'une réimpression plus récente, certainement de la dernière édition allemande publiée en 1628.


8 commentaires:

  1. Discussion oiseuse (mais je sais combien il est difficile de meubler les minutes dans les files d'attente…) : nul ne sait quelles sont les parts respectives de l'hérédité et de l'éducation, ou de l'environnement socio-culturel, dans la constitution de ce que nous sommes.

    Sinon, à l'appui de votre thèse, il est toujours avantageux de citer le cas de Péguy, fils d'une rempailleuse de chaises à peu près illettrée et “monoparentale”, devenu un brillant normalien et l'écrivain que l'on sait. Albert Camus aussi est très utile : pensez-y à votre prochaine visite chez les marchands de vieilleries…

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  2. De nombreuses thèses ont été écrites sur ces sujets s'appuyant en particulier sur des cas de vrais jumeaux séparés et il semblerait que l'intelligence soit avant tout génétique

    Je pense que la fraction 60/40 reflète assez bien la réalité...

    Maintenant chacun pense ce qu'il veut...

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  3. A Camus, Péguy, on peut ajouter une file d'autres noms dont Guéhenno un peu oublié aujourd'hui. Sans entrer dans ce débat sans fin, on pourrait tout de même dire à votre ami qu'on entre pas à l'ENA à six ans et, même si ses parents ne connaissaient pas l'existence de cette école, lui à 18 ans avait parfaitement la possibilité de la connaître en se renseignant un peu. Je crains que la thèse de la pure détermination sociologique (qui n'est pas fausse en soi mais fausse par l'excès qu'on lui accorde) ne soit souvent le prétexte pour justifier une certaine passivité.

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    1. Entièrement d'accord avec Monsieur A. Nonyme.

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    2. Enfin, "presque" entièrement : Guéhenno était, me semble-t-il, un songe-creux (a-t-on idée d'être rousseauiste, franchement ?) assez niais. Gide disait de lui : « Il parle du cœur comme d'autre parlent du nez. »

      Mais bon…

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  4. Il importe peu, dans cette discussion,de savoir si vous aimez ou non Guéhenno. Mais son exemple montre qu'on peut être fils de cordonnier,apprenti cordonnier soi-même et devenir normalien, agrégé des lettres, inspecteur général, écrivain, essayiste. Qu'on peut...ou qu'on pouvait.

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    1. Vous avez raison : je me suis un peu laissé emporter par mon enthousiasme juvénile…

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  5. Ah bah moi je suis assez d'accord avec les 80/20 de ton interlocuteur. :) Mais tu me connais je suis un vrai gauchiste. ^^

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