Ma mère déraille de plus en plus: elle commence à habiter un monde à elle, qui a sa propre logique, ses fulgurences, ses exigences. C'est quelque part un peu poétique, sauf quand elle sale plusieurs fois, quand elle oublie le gaz sous des casseroles vides ou qu'elle pose des questions dont on ne comprend pas d'où elle les sort : " combien étiez-vous à cette réunion ?". Quelle réunion ? J'ai répondu : " quinze!". Cette réponse a semblé la satisfaire, elle est retournée vers son assiette.
Elle ne parvient plus à tricoter, le tricot étant basé sur la mémoire immédiate: le dernier pull qu'elle a terminé pour son arrière petite fille était un peu bizarre. Mon ex-épouse, voyant cela, s'est proposé à le reprendre, mais moi je l'aurais gardé tel quel, beau témoignage de ses derniers efforts avant sa disparition dans un monde sans temps, sans mémoire.
Ceci dit, elle cuisine toujours très bien, mis à part quelques incidents. Mon père veille au grain, au gaz, à l'eau, aux mélanges etc, et le poisson de ce midi était tout à fait bien. La salade, par contre, avait reçu sa super dose de sel....
Voilà... Elle s'en va tout doucement....
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